Pacte avec le diable : mythe ou réalité?
Dernière mise à jour : 7 juin 2021

Le pacte avec le Diable est un thème récurrent des réflexions humaines, de la littérature, en particulier romantique, fantastique et gothique. Ce sujet est aussi abordé aujourd'hui dans les films et les séries mais la légende la plus connue reste celle de Faust pour la littérature et de Robert Johnson pour le monde musical. La légende de pacte avec le Diable reste élémentaire à de nombreuses traditions chrétiennes.
Le pacte :
Selon la croyance traditionnelle, le pacte est noué entre une personne et Satan (ou un démon). La personne offre son âme en échange de faveurs dites diaboliques, comme la jeunesse, la richesse, la connaissance, la renommée, le pouvoir, ... mais pour une durée limitée.
Passer un pacte reste un acte de sorcellerie dangereux, puisque 10 ans après l'accord, l'âme de la personne est récoltée et envoyé en enfer.
Certaines croyances parlent aussi de personnes ayant passé ce type de pacte comme d'un signe de reconnaissance du Diable. Ils ne demandent rien en échange.
Les légendes sont nombreuses mais la finalité reste la même : 10 ans d'une vie de rêve contre la damnation de son âme.

Personnes supposées avoir passé un pacte avec le Diable :
-Urbain Grandier, prêtre catholique de la ville de Loudun en France, accusé d'avoir pactisé avec le Diable. Les sœurs du couvent des Ursulines furent possédées par des démons afin de donner de l'ampleur à la reconquête de l'Eglise Catholique Romaine dans le contexte de la Contre-Réforme et du changement de mentalité en France.
-Lil Uzi Vert, rappeur américain suspecté d'avoir conclu un pacte avec le Diable. c'est du moins ce qu'il a tweeté, ajoutant que ses fans le rejoindraient en enfer.
Quelques œuvres qui parlent du sujet :
Littérature :

-Macbeth - William Shakespears (1606)
-La tragique histoire du docteur Faust - Christopher Marlowe (1588)
-Faust - Goethe (1808)
-L'elixir de longue vie (1830) et Peau de chagrin (1831) - Honoré de Balzac

-Les maitres sonneurs - George Sand (1850
-Le diable dans la bouteille - Robert Louis Stevenson (1893)
-La perle - John Steinbeck (1947)
Cinéma :

-La main du diable de Maurice Tourneur (1943)
-Pacte avec le diable de Cyril Frankel (1950)
-Crossroads de Walter Hill (1986) (Inspiré de la légende de Robert Johnson)
-Ghost Rider de Mark Steven Johnson (2007)
Télévision :
-Dans la série Supernatural, le pacte démoniaque est utilisé à plusieurs reprises sur les 15 ans de diffusions, avec un épisode en particulier de la saison 01, Crossroad Blues, du même titre que la chanson de Robert Johnson.
-Dans Les Simpson, dans le Simpson Horror Show IV - Homer Simpson et le Diable.
Musique :
-Crossroad Blues de Robert Johnson (1936)
https://www.youtube.com/watch?v=Yd60nI4sa9A
-The devil went down to Georgia de Charlie Daniels (1979)
https://www.youtube.com/watch?v=sh7BZf7D5Bw
-The small print de Muse (2003)
https://www.youtube.com/watch?v=K3JPO-K-vrY
De France et d'ailleurs :
La légende du Diable du Pont Valentré (Vallée du Lot - Quercy) : On raconte que l'architecte ne pouvant venir à bout de son œuvre, eut recours à Satan et fit un pacte avec lui.

Ce dernier s'engageait à l'aider par tous les moyens et à lui obéir ponctuellement, quelque ordre qu'il pu recevoir. Le travail fini, l'âme de l'architecte en devait être le prix. Si le démon, pour une cause quelconque, refusait de continuer son assistance jusqu'au bout, il perdrait tous ses droits sur le prix en question.
Mais cet architecte ne voulant pas avoir fait un "marché sot", demanda au Diable alors que le pont était sur la fin de sa construction :
"Ami, je t'ai trouvé docile jusqu'ici, et tu sais que tu dois l'être jusqu'au bout ; prends ce crible (seau percé), laisse-le tel qu'il est et va puiser le l'eau que tu porteras aux maçons pour délayer la chaux."
Le Diable se mordit les lèvres de dépit. Il tenta pourtant l'expérience, elle échoua 20 fois.
Confus le Diable vint avouer sa défaite, mais jura de se venger.
En effet, lorsque les maçons eurent presque achevé de construire la tour du milieu, ils en trouvèrent l'angle supérieur nord-ouest abattu et il leur fut impossible d'achever cette tour.
Un pacte avec le diable près du temple à Lanleff (Côte d'Armor/Bretagne) : À Lanleff, près du temple, la margelle d'une fontaine porte encore les marque d'un pacte avec le Diable .
La légende dit qu'une sorcière fit à cet endroit un pacte avec le Diable en personne, lui donnant son nouveau-né contre 12 pièces d'or.
Lorsque le Diable prit l'enfant, il jeta les pièces à la mère qui, voulant les attraper au vol, s'y brûla les mains.
Les pièces d'or sortaient du feu de l'enfer et on peut encore voir les marques qu'elles firent en tombant sur la margelle à côté de la source.
On ne le surnomme pas Le Malin pour rien...

Pour mieux les apercevoir, mouillez la pierre avec de l'eau, mais attention au sortilège...
La légende de Faust : héros d'un conte populaire allemand, elle a été à l'origine de nombreuses réinterprétations au fil du temps.

Faust, savant déçu de ne trouver solution à certaines problématiques condamnant son art, contracte un pacte avec le Diable.
Ce dernier met au service de Faust un de ses Esprits, Méphistophélès, afin de lui procurer un serviteur humain, l'étudiant Wagner, qui deviendra son "famulus". S'en suivra une nouvelle vie pour Faust, tournée cette fois vers les plaisirs sensibles, au prix de son âme.
Cette légende serait inspirée du Miracle de Théophile (pièce de théâtre par Rutebeuf, XIIIe S.) elle-même inspiré par le recueil narratif des Miracles de Notre-Dame du clerc Gautier de Coincy (XIIe-XIIIe s.).
En 1587, un écrit anonyme Historia von Johann Fausten est publié, traduit en anglais en 1593, puis reprit par Christopher Marlowe, situant l'action de sa pièce à Wittemberg. Goethe étudiera l'écrit de Marlowe et la tragédie de Faust éclipsera alors le Faust historique, dont on connaît peut de chose.
La vie de J.Faust a été écrite plusieurs fois : Georg Wiedmann (1953) traduite en français sous le titre Histoire prodigieuse et lamentable de J.Faust, grand magicien et enchanteur par Palma Cayet (de 1958 à 1674).
Heumann a composé une curieuse dissertation sur Faust à Wittemberg en 1683)
Quelques-uns ont pensé que Faust n'est autre que Johann Fust de Mayence, un des inventeurs de l'imprimerie, dont la vie aurait été défigurée par les contes populaires.
Quelques œuvres non littéraires traitants de la légende de Faust :
La damnation de Faust - Hector Berlioz (1846)
L'ouverture de Faust - Richard Wagner (1855)
Mefistofele - Opéra de Arrigo Boito (1868)
La 8ème symphonie de Gustav Mahler (1906-1907)
Les albums Epica et The Black Halo du groupe de heavy metal Kamelot

La chanson Faust dans l'album Silent so Long de Emigrate
Un groupe allemand s'appelle Faust
Dans le manga Black Butler de Yana Toboso
Faust est le titre d'une chanson d'Alain Souchon dans l'album C'est comme vous voulez (1985)
La chanson The Small Print de Muse s'appelait à l'origine Action Faust
La Damnation de Faust (1898), La damnation de Faust (1903) et Faust aux enfers (1904), films de Georges Méliès
La beauté du Diable (1950) de René Clair avec Michel Simon et Gérard Philippe
Phantom of the paradise (1974) de Brian de Palma
Faust et Méphistophélès, peinture de Eugène Delacroix (1827-1828)...
La légende de Robert Johnson : bluesman américain né en 1911 dans le Mississippi.

Il grandit dans la misère et le chaos familiale dans une amérique meurtrie par l'escalavage (ça ne fait que 50 ans qu'il a été aboli) et les tensions raciales.
Abandonné par son père biologique, puis son père adoptif puis sa mère, transporté de villes en villes, ses errances le conduisent à rencontrer deux mythes du blues : Charlie Patton & Willie Brown.


Robert à 18 ans et ses deux mentors lui enseignent les bases de la guitare blues. Mais il ne parvient pas à exceller et reste un musicien médiocre.
Au même moment, sa femme de 16 ans perd leur premier enfant à l'accouchement, ce qui le plonge dans une profonde dépression. C'est à ce moment que commence les premières rumeurs mystérieuses autour de sa vie.
On raconte qu'il aurait perdu son enfant à cause de sa passion pour le blues, autrement appelé "Musique du diable".
Malgré tout il continue sa vie de musicien.
Il finit par retourner dans sa ville natale où il rencontre Ike Zinnerman, son dernier mentor. Grâce à lui, le jeune bluesman découvre des nouvelles pratiques de perfectionnement à la guitare, notamment par des séances de répétition au cœur de la nuit au milieu des tombes.
Quelques mois plus tard, Charlie Patton et Willie Brown entendent parler d'un nouveau bluesman virtuose jouant dans tous les juke-points de la région.
Intrigués, ils assistent à un show un soir et quelle ne fut pas leurs surprises lorsqu'ils réalisèrent qu'il s'agissait de Robert Johnson.
Surpris par ses progrès, ils l'interrogent et découvrent un Robert Johnson transformé : en à peine quelques mois, Johnson est devenu virtuose de la guitare et chanteur habité. Il est acclamé dans tous les bars du delta du Mississippi. La seule explication qu'il donne à ce changement, c'est celle d'une rencontre fortuite au carrefour de deux routes à quelques miles de là.
Ce que nous apprennent ces morceaux, c'est qu'il aurait conclu un pacte avec le diable.
Dans les paroles de sa mythique chanson Crossroad Blues, il revient au carrefour pour demander pardon à Dieu pour son acte :
I went to the crossroad, fell down on my knees
I went to the crossroad, fell down on my knees
Asked the Lord above
Have mercy now, save poor Bob if you please
Dans le deuxième couplet, la théorie du pacte est aussi confirmée car les paroles veulent à la fois dire que Dieu ne répond pas mais aussi qu'il essaye de faire du stop et que personne ne le remarque. Ce couplet serait l'aveu d'un incident mystique où il aurait disparu du monde des vivants :
Standin' at the crossroad, tried to flag a ride
I tried to flag a ride
Didn't nobody seem to know me
Babe everybody pass me by
Dans Hellhound on my trail, il décrit comment il essaye d'échapper aux chiens de l'enfer, certainement envoyé par le dieu lui-même pour le rapatrier dans les abîmes:
And the days keeps on worryin' me
There's a hellhound on my trail, hellhound on my trail
Hellhound on my trail
Robert Johnson meurt à 27 ans dans des conditions étranges et jamais élucidées. Alors dans la fleur de l'âge, il est retrouvé mort un matin dans son lit et le mystère reste entier à savoir comment cet homme est devenu un virtuose et a écrit autant de chansons en si peu de temps.
Le malheur dans son histoire est qu'il enregistrera bien un disque qui resta inconnu du grand public pendant la première moitié du XXème siècle. Il fut redécouvert par les musiciens anglais des années 60, qui étaient influencés par les disque d'outre-atlantique. Lorsqu'on pense aux chansons Crossroads ou Love in vain, on pense d'abord à Cream ou au Rolling Stones avant de réaliser qu'elles ont en fait été écrites par Mr. Johnson.

